LE CENTRE D'ÉTUDES ARCTIQUES
Présentation : historique et activités
Le
Centre d'Études Arctiques a été fondé en 1957
par le Professeur Jean Malaurie,
à l'École
des Hautes Études en Sciences Sociales -dont le vocable à
l'époque était École Pratique des Hautes Études,
6ème section (sciences économiques et sociales). Cette création
permettait à la France d'avoir enfin, dans son Université,
le Centre de recherche qui lui manquait sur ces immenses espaces.
Le Centre d'Études Arctiques a été créé,
suite à l'élection du Professeur Jean Malaurie à
la chaire de géographie polaire dont il est le Professeur titulaire.
C'était la première chaire de géographie polaire
de l'histoire de l'Université française. Le Centre d'Études
Arctiques avait été établi dans le cadre d'un programme
d'" areas studies " qui, sous l'impulsion du Professeur Fernand
Braudel, visait à créer des centres de recherche en histoire,
géographie, sociologie, anthropologie et économie, sur des
secteurs négligés par l'Enseignement supérieur français
: Arctique, Pacifique contemporain, Afrique occidentale et centrale, Océanie,
Corée, Japon, Chine moderne et contemporaine, Inde et Asie du Sud,
le monde russe soviétique et post-soviétique.
Le commandant Jean-Baptiste
Charcot avait été nommé en 1910, directeur d'Étude
honoraire au " Laboratoire maritime de l'École Pratique des
Hautes Études ": 3ème section. Le laboratoire maritime
était le célèbre " Pourquoi Pas ? ". Le
Professeur Jean Malaurie succédait, ainsi qu'aimait le rappeler
Fernand Braudel, au commandant Charcot.
Le Centre d'Études Arctiques a pour horizon de recherche :
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les sciences de la terre :
les sciences de la terre : les problèmes de géomorphologie
quantitative des processus visant à établir un bilan
raisonné à l'érosion en un temps donné,
les problèmes de géocryologie, de paléoclimatologie
et les problèmes de géologie structurale (champs de
tension, du nord-est du Canada au nord du Svalbard) ;
les sciences de la vie : la chronobiologie humaine (le Dr Reinberg)
; et les problèmes d'hypersensorialité chez les Peuples
premiers (le Professeur Marc Tadié) ;
les sciences sociales : l'anthropogéographie, les structures
socio-économiques, l'identité culturelle des peuples
arctiques (Inuit, Sames, Indiens, peuples du nord sibérien),
l'histoire de l'exploration, et les problèmes liés au
développement de ces espaces.
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Jean Malaurie devant la plaque du Centre d'Études Arctiques
; 1980
©Jean Malaurie |
L'enseignement du Directeur d'Études a été
poursuivi, de 1957 jusqu'à nos jours et il continue à
se poursuivre en anthropogéographie, ethnohistoire, ethnophotographie,
anthropologie réflexive et littérature dans l'Arctique,
et économie de développement, notamment dans les secteurs
inuit, c'est-à-dire l'Arctique central et oriental canadien,
l'Alaska et la Sibérie. On peut suivre le programme de cet
enseignement et la vie académique du Centre d'Études
Arctiques, chaque année, grâce à l'Annuaire de
l'EHESS ; le professeur Jean Malaurie a publié régulièrement
ces comptes rendus de 1957 à 2002.
Le Centre d'Études Arctiques vise à se situer dans le
cadre de l'École des Annales et de son approche tout à
la fois interdisciplinaire et globale d'un espace et d'une civilisation.
L'École des Annales s'est traduite par ce que l'on convient
d'appeler la nouvelle histoire, animée par Lucien Febvre, Marc
Bloch, Fernand Braudel, Charles Morazé, et qui a été
sans aucun doute la plus illustre école géohistorique
en France et à l'étranger, dans les cinquante années
qui ont suivi l'après-guerre. Le professeur Jean Malaurie s'inscrit
en tant qu'anthropogéographe dans ce courant d'idées.
Les études conduites sont donc d'ordre à la fois spatial
et diachronique. Naturellement, certains secteurs sont privilégiés
compte tenu des orientations particulières des doctorants,
mais seule une approche globale sous le signe des sciences sociales,
approche ne négligeant pas ce qui fonde une civilisation, (c'est-à-dire
son environnement naturel et les sciences de la vie) permet à
la recherche française de s'inscrire en pointe dans une recherche
internationale très active et qui a tendance à privilégier
des recherches spécialisées. C'est cette approche internordique
et interdisciplinaire qui a fondé à l'étranger
l'originalité et le prestige du Centre d'Études Arctiques. |
Le Centre d'Études Arctiques a mis à nouveau en activité,
et sous son égide, en 1979 la base du Svalbard qui était abandonnée
depuis plus de dix années. Le Centre d'Études Arctiques a
administré cette base, qu'il a fait moderniser par le CNRS, de 1979
à 1989 avec un comité exécutif dans le cadre d'une
RCP -Programme de recherche de coopération créé en
1979 par Jean Malaurie et transformé à sa requête en
GDR (Groupe de Recherche Arctique) en 1982.
Les principaux résultats obtenus dans cette base ont été
présentés dans la revue Inter-Nord n°20. Les principaux*
travaux ont été réalisés en géomorphologie
intégrée, en coopération avec le centre de géomorphologie
de l'Université de Caen, le laboratoire de géographie physique
de l'Université de Paris III, le laboratoire de géographie
de l'Université de Besançon, le laboratoire de géographie
de l'Université de Brest et le laboratoire de la montagne alpine
de l'Université de Grenoble et l'EHESS.
*Svalbard, Sciences de la Terre : les principaux résultats du GDR,
Études arctiques 1980-1989, Inter-Nord n°14, 1961, p. 399-478
:
- Charles-Pierre PEGUY, Les Français au Spitsberg:
1946-1967, pp.399-414.
- Jean MALAURIE, Notes for the future. Taking stock of french arctic
research in Svalbard (the CNRS arctic base) King's Bay: 1979-1989. |
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- Marie-Françoise ANDRE, Colonisation végétale
et géodynamique des versants en milieu polaire océanique
(Svalbard, 79°N), p. 415-426.
- Thierry BROSSARD et Daniel JOLY, Plantes et climat: pour une modélisation
phénogéographique du paysage (test d'application au
Svalbard), p. 427-438. |
- Arnaud HEQUETTE, Dynamique morpho-sédimentologique et évolution
du littoral dans la région du Kongsfnord, Spitsberg, p. 439-444.
- Bernard LEFAUCONNIER, Note sur les connaissances actuelles concernant
les glaciations pléistocènes au Svalbard, pp. 445-448. |
|
- Bernard LEFAUCONIER, Fluctuations récentes des glaciers
dans le Kongsfjord (baie du Roi) 79°N Spitsberg, Svalbard, p.
449-454.
- Claude LEVPVRIER, L'évolution tectonique de la chaîne
tertiaire au Spitsberg, p. 455-464. |
- Ronald S. SLETTEN and Fiorenzo C. UGOLINI, Pedogenic processes
in well-drained soils of Spitsbergen and Nordaustlandet, p. 465-470. |
|
- Brigitte VAN VLIET-LANOË, Recherches cryopédologiques
sur la rive sud du Kongsfjord: de l'origine des sols structurés
périglaciaires. Gonflement cryogénique différentiel
et gradient de gélivité, p. 471. |
En 1989, le comité exécutif du GDR arctique CNRS, dirigé
par Jean Malaurie, devenu à cette date Directeur de recherche émérite
du CNRS, a transmis ses fonctions au géomorphologue Thierry Brossard,
directeur de recherche au CNRS et qui avait fait sa thèse de doctorat
d'État au Centre d'Études Arctiques sur des problèmes
de géomorphologie du Svalbard et sous la direction du professeur
Jean Malaurie.

" le STAFF (le secrétariat de direction
du Centre d'Études arctiques) en 1990, de gauche à droite
: Sylvie Devers, Elisabeth Cardin, Professeur Jean Malaurie,
Huguette Joffres, Annie Serbennet, à l'extrême
droite, un chercheur qui visite LE CENTRE D'ÉTUDES ARCTIQUES
et va prochainement soutenir une thèse d'histoire arctique.
"
© Jean Malaurie |
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Le Centre d'Études Arctiques a réalisé des programmes
de coopération étroite, avec le professeur Jean Malaurie
comme consultant, d'abord avec le gouvernement danois au titre de la base
de Thulé, un projet sur l'avenir des Inughuit, compte tenu de la
base américaine (1967), puis avec le ministère des Affaires
indiennes et le Nord canadien, (Ottawa 1960-63) dans le cadre du Northern
Research Cooperation Center (mission de Jean Malaurie à Igloulik,
1960, 1961 ; chez les Netsiligmiut, 1961 ; sur la côte ouest de la
baie d'Hudson, Rankin, Chesterfield, Baker Lake, 1962 ; à Back River
avec les Utkhikhalingmiut, 1963). En 1968-69, a eu lieu, à la demande
des Président Charles de Gaulle et Premier Ministre Daniel Johnson,
un large programme de coopération franco-québécois.
À ce titre, figurait un chapitre de coopération dans le nord
de la péninsule de Ungava (Nunavik), à la requête de
la Direction Générale du Nouveau Québec. Dans le numéro
20 d'Inter-Nord (2002, CNRS/Economica), figurent les principaux rapports
de ce programme de coopération, sous la responsabilité de
Jean Malaurie, rapporteur général, avec les grandes lignes
des recommandations, suivies d'un commentaire du Sénateur inuit Charlie
Watt et de Mark Malone, conseiller du Sénateur Charlie Watt à
Ottawa.
Dès 1959, un programme de coopération a été
établi avec l'Académie des sciences de l'URSS, Institut d'ethnographie
qui s'est traduit par une collaboration étroite des savants et anthropologues
soviétiques (successivement les Professeurs A.P Okladnikov, S. Arutiunov,
I. I. Gurvitch) à la revue Inter-Nord
et à quatre colloques bilatéraux, publiés en français
et en russe (Leningrad 26-29 avril 1982 : l'ethnographie et l'anthropogéographie
arctiques ; Paris 25-29 avril 1983 : l'économie traditionnelle :
tradition et progrès ; Leningrad 11-15 novembre 1987 : les premières
expressions de la religion chez les peuples de l'Arctique ; Paris 12-14
mars 1991 : crises d'identité chez les peuples de l'Arctique : constat
circumpolaire et propositions pour l'avenir).
En 1989, le conseiller scientifique et culturel du Président Mikhaïl
Gorbatchev, l'Académicien Dimitri Likhatchev, a chargé le
Professeur Jean Malaurie de la direction de la "
Première Expédition d'étude russo-française
en Tchoukotka ", berceau des Inuit. Cette expédition de
quinze personnes a eu lieu en août-septembre 1990 sous l'égide
du Gosplan (Leningrad), du Fonds de la culture de l'URSS (Moscou), du CNRS
(Paris). C'était la première expédition internationale
en Tchoukotka depuis la Révolution d'Octobre (Tchoukotka, 1990, collection
Polaires, éditions Economica, 2003, sous la direction de Jean Malaurie
; et un film Syndrome Tchoukotka, Saint-Pétersbourg, 1991, diffusé
sur les écrans russes et déposé à l'INA (1992).
Depuis sa création, Le Centre d'Études Arctiques a organisé
14 colloques arctiques
internationaux, soit en moyenne un tous les trois ans pendant la période
considérée (1958-1991). Plusieurs d'entre eux se sont avérés
tout à fait pionniers dans leur domaine, tels ceux sur " la
crise d'identité pan-Inuit " (1969), sur le pétrole
et le gaz arctiques (1973), l'histoire des sciences sur le pôle
Nord (1983).

" Réunion dans la bibliothèque
du Centre d'Études arctiques, 1989. L'équipe du Centre
d'Études arctiques, de gauche à droite : Elisabeth Cardin,
secrétaire du CEA ; Arlette Fraysse ; chargé des
questions sibériennes et traductrice ; Sylvie Devers
: bibliothécaire du Fonds Polaire Jean Malaurie ; Hélène
Salaün de Kertanguy : chargé de programmes de test
psychologiques chez les Inuit ; Professeur Taksami : directeur
de la section d'ethnographie de l'Académie des Sciences
; une interprète franco-russe du Ministère des
Affaires Etrangères ; deux ethnographes russes de l'Académie
des Sciences ; Professeur Christian Meriot : spécialiste
des Sames et professeur à l'université de Bordeaux
; Professeur Jean Malaurie : directeur du Centre d'Études arctiques.
"
© Jean Malaurie |
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