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Accueil -> Rubriques -> Routes polaires -> L'utilisation d'un hydravion Stinson par les EPF

L'hydravion Stinson au service des Expéditions Polaires Françaises

LA DEUXIÈME EXPÉDITION



Préparatifs. Embarquement de l'hydravion

En septembre 1949, le " Commandant Charcot " sort de son radoub au Bassin Tourville et va pouvoir recevoir son hydravion. On lui installe des chantiers spécifiques sur la plage arrière, simples rails de bois qui lui permettront de cou1isser. En mer, la position de l'appareil sera avancée au plus près du centre du navire, à l' aplomb du mât arrière, à l' abri des lames et des embruns. En le faisant coulisser tout à fait à l' arrière, on peut le " cueillir " avec le mât de charge métal1ique, pour le mettre à l'eau.
Le Stinson Voyager F-BEXE des Expéditions Polaires Françaises a quitté la région parisienne au début de l' été pour Lanvéoc-Poulmic, où ont été installés ses deux flotteurs.
Son pilote, Pierre Wildlund a effectué ensuite des essais de déjaugeage, de décollage puis de manœuvrabilité. Il rallie la rade de Brest en vol, le 30 août 1949.

 
Photo Robert Pommier


Pierre Wildlund, né à Paris 17ième le 7 septembre 1908, d'une famille de tailleur, a été bourier de pilotage et a reçu son brevet de pilote le 6 juin 1929. Il n'a cependant pas fait carrière dans l' Aéronautique Navale, et se trouve sans emploi au moment où les Expéditions Polaires recherche un pilote d'hydravion civil. Il est surnommé " Monsieur Pierrot " par tout l' équipage, il s' intègre immédiatement à l'expédition antarctique.

Une grue pose délicatement sur son bâti le Stinson entièrement peint en rouge, sauf le capot moteur orné d'un filet blanc se poursuivant jusqu'au cône d'hélice inclus. Les flotteurs et leurs mâts de liaison sont peints en blanc, couleur qui disparaîtra en cours de croisière pour laisser place à l'aluminium d' origine, du fait des chocs contre les petites glaces flottantes. Sur la dérive, en trois mots décalés et superposés, figure en lettres blanches le nom du du propriétaire " Expéditions Polaires Françaises ".

Le Stinson F-BEXE Par Stinson 108-2 Voyager {ex-Flying Wagon) n° 3495 F-BEXE Construit en 1947, il est issu de l'amélioration du modèle 150. L'origine de ces différents modèle date de 1937. Deux modèles 108 étaient disponibles dont un possédait un système d'adaptation de flotteurs ou de skis " Edo " Moteur de 165 cv, un Franklin 6A4-165-B3. Hélice à pas variable automatique. 1ère visite du Bureau Véritas {BV) à Toussus le 03.08.48 à 72h CdN le 24.08.48 au nom de: République Française (Expéditions Françaises Polaires), base Le Bourget, puis Mitry.  
Le F.BEXE en 1949 avant sa mise sur flotteurs. Coll. Claude PETIT
L'immatriculation figure en grande lettre blanches sur l'extrados et l' intrados de la voilure, de part et d'autre du fuselage.
C'est le 20 septembre qu'embarquent les membres de l' expédition polaire, sauf Liotard, Marret et Harders qui rejoindront à Dakar. Widlund est à bord. Les ailes du Stinson sont mises en caisses après les derniers essais de déchargement et de décollage depuis la rade. On peut entreprendre la longue descente de l' Atlantique.

Persévérance et réussite

Le " Commandant Charcot " fait escale à Dakar du 30 septembre au 6 octobre. Le 10, il franchit l'équateur. Le 15, il passe devant Sainte-Hélène, sans s'arrêter, tant Douguet tient à arriver au plus tôt en Antarctique. Le 20 octobre J.Martin, cinéaste et intendant de l' expédition décède brutalement, il sera inhumé au Cap, où se déroute le navire. Liotard et Guillon débarquent avec quelques membres d'équipage pour rendre les honneurs funèbres. Ils rejoindront à Durban, où le " Commandant Charcot " va stationner huit jours pour réparer les deux moteurs.

 
Coll. Jean Delmas

Le 6 novembre, c'est le départ pour Melbourne, afin de récupérer les chiens esquimaux (qui ont fait 22 petits dans l'intervalle !). En longeant l'île Saint-Paul, on croise le dernier chalutier trois mâts-barque français " Le Cancalais " en pêche. C'est le 8 décembre que le navire touche sa base arrière de Hobart. Le Stinson est débarqué sur le quai du port, révisé et remonté. Le 20 décembre, il effectue son premier vol depuis le départ de Brest. Aucun incident n'est a signaler, et l'hydravion est hissé sur la plage arrière, voilure en place cette fois. Le lendemain, on quitte Hobart, direction plein sud.
Le premier iceberg est signalé le 28 décembre. Le jour suivant, le pack est en vue, semblant de nouveau infranchissable.
Dès l'arrivée dans les glaces, le souci constant du Commandant est de pouvoir faire voler l'avion à tout moment. Ceci nécessite : peu de vent, ciel dégagé, plafond haut, couloir d'eau libre. Circonstances rares en Antarctique ! Par conséquent, puisque la frange nord du pack est bordée de la grande houle australe, il va falloir profiter autant que possible des petits chenaux d'eau libre créés temporairement par la dislocation de la couche de glace marine. Le Journal de Bord du " Commandant Charcot " relate les tentatives de franchissement, égrenées au fil du calendrier. Mais il ne faut pas perdre de vue qu'en cette période de soleil de minuit, il est impossible de distingués les jours des nuits. Les événements s'enchaînent donc sans respect des rythmes normaux de sommeil.

Du 31 janvier au 2 février 1950, les essais de percée sont infructueux. la météo est médiocre. Le 3, le temps bouché empêche l'hydravion de voler, malgré un bon couloir d'eau lisse. Et le lendemain, le chenal s'est trop rétréci par suite de la poussée des floes. On repart vers le nord, et le Stinson est-mis à l'eau à l'abri d'un grand iceberg tabulaire de 6 kilomètres de long, dont la dérive dans le pack laisse une longue traîne d'eau libre. Widlund décolle à 18h avec Guillon comme observateur (vol n°l) ; atteignant la base des nuages (à peine 400 mètres), à la verticale du navire, ils vont rentrer sans avoir vu de passage : pack homogène à 50 % d'eau, gros floes régulièrement disposés, pas de chenaux. la visibilité réduite empêche de voir l'horizon vers le sud. Un vol de reconnaissance " lointaine " (25 milles, soit ¼ d'heure à peine !) est programmé pour le lendemain.


Source le Gac Coll. Lucien Morareau
  5 janvier. Impossible de voler pour cause de météo. On fait route au sud-ouest, puis au sud, jusqu'au pack à 65°39 et 144° est. Rien à faire, Route nord-ouest, nord, nord-est pour se remettre à l'abri.
Les deux jours suivants sont toujours aussi décevants : brume et neige, vent à 40 nœuds. On pousse à l'ouest, en surveillant les icebergs au radar. Le méridien 138 est atteint le 7, par un beau soleil, mais il est inutile d'aller plus à l'ouest, toutes les observations antérieures indiquant qu'à partir de là le pack est accroché toute l'année à la Côte Clarie. Route à l'est.
C'est le 8 janvier que l'hydravion va commencer à prouver son utilité (vol n°2). Sur un plan d'eau à l'abri d'un iceberg le Stinson décolle, emportant Widlund et Guillon, avec le plein et deux jours de vivres … on ne sait jamais. Ils font cap au sud à 400 mètres d'altitude seulement, sous un ciel lourd, jusqu' à la bordure du pack épais. Détaillons un peu ce vol ;
Position initiale 65°14 S- 140°10 E, vent S.S.E. 20 nœuds avec petites rafales, grand plan d'eau peu encombré de glaces, petit clapot. Plafond de départ 800 m, parfois 1500 m, avec alto-cumulus isolés, nébulosité totale 8/10. En fait le plafond va " s'écrouler " sitôt le décollage.
 
Photo Robert Pommier
- Minute 0: passé à la verticale du "Commandant Charcot", route sud, altitude 600- 700 m.
- Minute I: pack à 90 % d'eau.
- Minute 3 : pack à 90% d'eau, glaçons en cordons irréguliers, gros floes ayant probablement plus de 100 mètres. Minute 5 : pack à 70 % d'eau, même aspect.
- Minute 9: pack à 50% d'eau, glace assez régulièrement distribuée, gros floes.
- Minute 10 : à 5 milles environ dans le sud, pack solide et compact à bordure franche, sans aucune fissure, s'étendant à perte de vue de l'Est à l'Ouest. Dans l'Est, il semble s'infléchir vers le Sud. Epaisseur estimée 20 à 25 milles. Derrière cette barrière, aperçu la mer intérieure jaunâtre, libre, parsemée d'immenses icebergs.
- Minute 11: route à l'est.
- Minute 12 : route au nord, rallié le " Commandant Charcot ".


Coll. Jean Delmas
  L'avion a du rentrer par suite d'un refroidissement trop important du moteur dû au réglage mal connu des volets de prises d'air. L'analyse du rapport des deux observateurs conclut à un pack ancien non craquelé, bref infranchissable.
Sur ces informations, Douguet décide de ne pas persévérer dans ce secteur et donne l'ordre de faire route beaucoup plus vers l'est de la Terre Adélie. Deux vols (n° 3 et 4) sont effectués dans la journée du 9 janvier, vers 9h puis à l5h30, sous plafond bas ne dépassant pas 150 mètres, et ne révèlent aucune brèche. Le pack n'est plus soudé mais seulement serré, avec de petites poches d'eau s'infléchissant vers le S.E. Le "Commandant Charcot" rembarque le Stinson et poursuit son chemin vers l'est.

Même résultat infructueux de deux reconnaissances aériennes le 10 (vols n° 5 et 6), malgré un calme plat. Après la cinquième minute de vol seulement les conditions météo se gâtent.
L 'hydravion descend à moins de 100 m d'altitude, et la dernière mention au journal de bord signale quelques grandes flaques d'eau vers le Sud Pour la sécurité de l'équipage, la mission est interrompue. L'appareil entre dans des nuages de neige s'étendant jusqu'au sol, et Widlund doit rentrer en PSV, à 50 d'altitude seulement., sur une route de ralliement transmise en phonie par l'aviso. Il fait froid, mais on a eu chaud ! La visibilité n'excède pas 500 m jusqu'au 13 janvier, empêchant tout nouvel essai.

l4 janvier : la température" extérieure s'élève de quelques degrés. Sans attendre les observations aériennes, le Commandant décide de se faufiler vers le sud, progressant en escalier jusqu'au 66° degré de latitude sud. On constate que le pack commence à se disloquer. La journée du 15 vient de débuter, sans que personne ne s ' en rende compte en fait, et l' étau se desserre. En milieu d'après-midi, le "Commandant Charcot" augmente l'allure. A 7 heures, c'est enfin la mer libre. Cap au sud, et une heure plus tard la terre ferme est signalée à l'horizon !
Tout n' est pas gagné cependant. Le navire approche du continent antarctique à la hauteur de Commonwealth Bay, où Douglas Mawson a séjourné en 1911 et 1912. La baie est encombrée de glaces, rendant impossible un débarquement sur la terre ferme.

Le 16 janvier, petit vol (n° 7) lancé vers 6h30 de Widlund et Guillon, qui repèrent de petits chenaux étroits dans l'ouest. Le navire tente vainement de s'y faufiler pour atteindre la terre toujours inaccessible. En fait, le " grand plan d'eau libre " signalé dans le S.O. est un immense floe transparent non craquelé. . . Le lendemain 17 janvier, l'hydravion décolle à 9 heures du matin (vol n°8) et signale un nouveau chenal. Quatre heures plus tard, il n'y a plus que 200 mètres à franchir, mais le navire est bloqué. Les manœuvres et les coups de bélier de l'étrave sont infructueux. Même l'usage d'explosifs reste vain. Et à 8 heures du soir, on est revenu au ~int de départ ! Un autre vol (n°9) dans la soirée rapporte que l' amas de glace est en mouvement très lent vers le nord et se décolle du rivage. Pour tromper le temps, l'équipage et les membres de l'expédition polaire organisent une partie de football sur un grand floe plat. Pendant ce temps, le Commandant Douguet embarque dans le Stinson à 21h. Est-ce le privilège hiérarchique ? Toujours est-il que ce troisième vol de la journée (n° 10) va être décisif. Lorsque l'hydravion revient, la partie de foot est toujours en cours. Mais c'est immédiatement le rappel à bord: un nouveau chenal a été aperçu! Le "Commandant Charcot" s'y engage aussitôt, malgré la panne d'un de ses moteurs.

Poussant les glaces, il arrive bientôt … à un caisse de dynamite abandonnée le matin même. En fait, le chenal s'est rouvert de lui-même en quelques heures. A 1 heure du matin, le navire mouille en eau libre, par 40 mètres de fond, à un mille du rivage dégagé des glaces de la terre Adélie, au cap découverte.

Installation de la première base polaire

Le débarquement du 18 janvier n'est que provisoire. Il n'y a là qu'une petite bande de mer libre de 5à 5 milles de large entre la terre et le pack. Ailleurs, la banquise est accrochée au continent. Douguet ordonne de pousser jusqu'au Cap Margerie, sur un site bien meilleur.

Le 20 janvier, 110 ans exactement après Dumont d'Urville, les Français reprennent pied en Antarctique. Il fait un temps superbe, mais cela ne va pas durer, car le vent remonte bientôt à 50 nœuds. On s'échine à mettre à terre le maximum d'équipement malgré l'avarie du moteur du canot de bord
Deux weasel de 2,7 tonnes sont transbordées sur des chaland halé à la force des bras depuis la côte. Lorsque la tempête est trop méchante ( l'anémomètre finit par se bloquer à 60 nœuds …, le " Commandant Charcot " s'éloigne un temps du rivage, met le cape, et revient après l'accalmie. Pendant cette période, le Stinson effectue quelques vols d'exploration des abords du mouillage et des prises de photos.

L ' équipement de la base, baptisée Port-Martin, en mémoire de l'explorateur décédé en mer, se poursuit jusqu'au 29 janvier : installation des chalets, transport des vivres, du carburant, des équipements scientifiques. Les chiens esquimaux. débarqués le 2 février, commencent à décimer la colonie de manchots adélie... Les " Polaires " vivent maintenant à terre, testant les installations où ils vont rester un an entier.
Il est temps de songer au retour .

Retour par Kerguelen

Le 8 février, le " Commandant Charcot " fait ses adieux à l'expédition polaire, et entreprend de longer la côte maintenant complètement dégagée de glaces puisque le pack a dérivé vers le large. Aucune trace du passage de Dumont d'Urville n'est trouvée sur l'ilot Dumoulin. Le lendemain, la journée est passée à Commonwealth Bay, maintenant libre de toute entrave, puis au Cap Denison où se trouve, intact, le campement de Mawson. Le Stinson va devoir de nouveau faire preuve de son utilité. Ce même 9 février, il est remis à l'eau et exécute un vol de reconnaissance jusqu'à la bordure sud du pack, qu'il va falloir percer en sns inverse. Les essais directs ers le nord sont infructueux et Douguet tente le passage de plus en plus vers l'est.

Vols et avancées se succèdent les jours suivants. L 'hydravion tourne comme une horloge. Ses observations permettent de déceler les fractures du pack et de les sigoa1er au " Commandant Charcot " (les liaisons radio ont toujours été excellentes) pour que celui-ci s'infiltre toujours un peu plus au nord après avoir repris le Stinson.

Le 13 février, celui-ci est arrimé une bonne fois pour toutes sur la plage arrière. Ecartant les derniers floes, l'aviso polaire atteint l' océan par mer houleuse et fait route sur Hobart, atteint le 25 février. Dans le port tasmanien, les réparations les plus urgentes sont faites sur le navire. Il faut notamment enlever les débris des plaques métalliques de protection qui ont été en grande partie tordues et arrachées par les glaces et qui freinent beaucoup la marche. Puis c'est un nouveau départ, le 15 mars . Dans un premier temps on stoppe à l'île Heard pour ravitailler une mission scientifique australienne installée à côté d'un hydravion Walrus éventré.
Le 5 avril, le " Commandant Charcot " s'arrête à Kerguelen, au mouillage de Port-aux-Français, où une base permanente a été installée depuis décembre par l'aviso " La Pérouse ".

Le Stinson est descendu à la mer une dernière fois. Pour cet ultime vol de la campagne. Widlund embarque Luc Marie Bayle comme observateur, pour un vol sur la Pointe Courbet, à la demande du chef de mission.
" Décollage ; il fait un soleil radieux et dans la carlingue il fait presque chaud Le paysage est féerique : côte découpée à l'extrême ; la presqu'île très marécageuse par endroits est trouée de poches d'eau, comme une meule de gruyère, et dans le fond le Mont Ross, tout enneigé, avec les grandes tables blanches du glacier Cook ".
" Des milliers d'oiseaux clairs planent au-dessous de l'avion, défilant sur l'eau sombre de la baie où ondulent, comme une moisson dans le vent, les longues chevelures peignées des laminaires ".

Voilà au moins une description qui s'écarte du style rigide et précis des journaux de bord. . .
Les jours suivants, l'équipage s'emploie à capturer divers animaux pour le Zoo de Vincennes (dont la plupart mourront avant d'arriver à Madagascar) : manchots, albatros pétrels, lapins, et même deux éléphants de mer.
Le 12 avril, sur la route du retour, le " Commandant Charcot " s'arrête à l'Ile Saint-Paul, pour pêcher quelques centaines de kilos de langoustes en quelques heures. L'île est vide d'habitants depuis l'épidémie de scorbut qui tua 96 pêcheurs malgaches et bretons, ne laissant que trois survivants dans la conserverie m!lir!~t en mines.
Et c'est enfin le retour, par Madagascar, Djibouti et Bizerte. Le 10 juin 1950, le navire s'amarre au quai du port militaire de Brest, mission remplie.

Conclusions sur l'emploi de l'hydravion

Autant les deux rapports de la Marine Nationale que celui des Expéditions Polaires Françaises rendent hommage à la présence de l'hydravion embarqué par le " Commandant Charcot ". Il est indéniable que, malgré les limitations imposées par la météo, son emploi a permis d'éviter un nouvel échec au franchissement du pack.

Sa mission était double :
a) Eviter au navire d'aller " se casser le nez " sur une barrière infranchissable, peut-être après des journées d'efforts. Signaler tout pack solide devant obliger à faire route Est ou Ouest pour tenter de pénétrer sur une autre longitude.
b ) Chercher les zones les plus pénétrables et essayer de chiffrer le pourcentage d'eau et de glace, les dimensions des amas de floes, les dimensions des floes eux-mêmes et celles des différentes poches d ' eau, en rapportant tout aux possibilités de de franchissement du " Commandant Charcot ".

Pour ce faire, l'aile haute de l' appareil était un bon choix. Le pilote regardait par la vitre de gauche, l'observateur par celle de droite, chacun dans un gisement allant de 30 à 90° . Les photos obliques ne pouvaient être prises qu' en ouvrant la vitre, et avec un appareil petit format

 

Bien qu'il pût théoriquement transporter trois passagers dans sa version hydro, le Stinson ne fut utilisé qu' avec Pierre Widlund, pilote, et un officier du bord chargé de l'observation. Quelques vivres de réserve et des vêtements chauds, le poste radio, un dinghy et les brassières de sauvetage prenaient pratiquement toute la place disponible derrière les membres de l'équipage. Remarquablement sûr en vol, manœuvrant bien à l' eau par vent moyen, décollant et se posant sur des espaces réduits pour autant qu'il n'y ait pas trop de clapot, l'hydravion n'a donné lieu à aucun incident. La mise à l' eau et le hissage étaient assurés par un mât de charge parfaitement au point.

Ce n'était pourtant qu'un excellent appareil de tourisme, et rien n' avait été prévu pour un emploi en conditions rigoureuses. Par exemple, il ne possédait pas de dégivreur ! Côté équipement, il disposait d'une installation complète de PSV, mais pas de radio-compas. Le compas magnétique était inutilisable à cause de la proximité du pôle magnétique. Le conservateur de cap s 'est avéré excellent, nécessitant au départ un passage le long du bord, en route parallèle, pour mise au cap. Pas de navigation possible en l'air : il fallait marcher au chronomètre et s'en tenir rigoureusement au graphique simple des routes prévues avant le décollage. Il aurait été si facile de se perdre dans les étendues blanches...
Fort heureusement, les liaisons radio avec l' émetteur OTC marchaient remarquablement en phonie, le "Commandot Charcot " goniométrant les émissions de l'avion et envoyant sur demande la route du retour.

Ce sont les conditions météorologiques qui ont dicté les périodes d'emploi possible du Stinson. Plafond moyen à 150 mètres, chutes de neige, nébulosité 10/10, conditions givrantes, empêchaient toute tentative de reconnaissance.
La sécurité des vols a toujours été placée au premier plan. Un quart d'heure de vol, soit 25 milles, équivalait à une bonne journée de progression de l'aviso dans les glaces. Pour des raisons de sécurité, l'hydravion ne dépassa jamais cette distance, jugée maximum pour une rescousse en cas d ' avarie ou de crash. D'autre part, la distance lointaine n'était pas l'objectif recherché. On estimait qu'à 900 mètres d'altitude l'observateur pouvait voir avec bonne visibilité sur un rayon bien suffisant d'une cinquantaine de milles. Un vol à la verticale du navire avec un bon plafond devait donc donner plus de renseignements qu'un vol lointain à basse altitude.
Hélas, les conditions de temps idéales ne furent jamais réunies, et quand des vols eurent lieu, avec des plafonds bas, voire très bas, la visibilité n' a jamais dépassé 5 milles...


Sources :
- Extrait du journal N° 195 "Le Trait d'Union", revue de branche française d'Air Britain
- Auteur de l'article : Patrick Vinot Préfontaine


Nous remercions M. Jean Delmas président de l'assocition qui nous a autorisé en avril 2001 à publier cet article.


L'hydravion au service des EPF  
La première expédition La fin confuse de la troisième expédition
La deuxième expédition Le "Commandant Charot"
   
  • Sources et remerciements

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