Le départ de la Jeannette
Le
8 juillet 1879, la Jeannette quitte le port de San Francisco, sous les
acclamations de la foule. Après une escale le 3 août à
Ounalaska (îles Aléoutiennes), elle atteint St Michel le
7 août, une île du littoral de l'Alaska. Sur cette île,
l'expédition fait le plein de provisions en vue d'un ou de deux
hivernages et fait monter 40 chiens esquimaux à son bord. Deux
Alaskiens se joignent à l'équipage : Alexey l'interprète
et Anéguin le soigneur des chiens. Le 20 août, le navire
quitte St Michel et arrive cinq jours plus tard dans la baie de St Laurent.
Le 27 août, le départ est donné pour le détroit
de Béring. Le détroit passé, les premiers icebergs
apparaissent déjà.
Le 6 septembre 1879, la Jeannette est prisonnière des glaces dans
les environs de l'île Hérald (avant la terre de Wrangel),
vers 71° de latitude Nord.
Premier hivernage
La Jeannette, emprisonnée par les glaces, est entraînée
par la dérive du côté des quatre points cardinaux.
Dès septembre, les températures chutent. Le 21 octobre 1879,
elles affichent - 24° C. Le premier hivernage débute, et mi-novembre,
la nuit polaire s'installe pour 71 jours. A bord, la vie s'organise. Les
hommes, tous en parfaite santé, s'occupent à entretenir
le navire en bon état et à chasser l'ours, le phoque ou
le morse. Leur moral est bon, malgré les inquiétants craquements
de la glace, qui menace à tout moment de broyer le navire.
L'année 1880 commence sous un froid de - 40° C. Fin janvier,
lors d'un mouvement des glaces, et alors que le soleil fait ses premières
apparitions, une voie d'eau se déclare dans la coque du navire.
La température de - 45° C en février, atteint - 47,5
° C dans les premiers jours de mars. Il est difficile de ne pas céder
à l'ennui des monotones journées à bord du navire.
De Long attend avec impatience le printemps et la fonte des glaces qui
libèrera la Jeannette, lui permettant de reprendre son chemin.
Sur son carnet, il relate quotidiennement les incidents de la journée.
Malheureusement, en avril, ses espoirs s'amenuisent. Les températures,
insuffisamment hautes pour accélérer le dégel, laissent
prévoir une libération trop tardive pour atteindre, cette
saison, le pôle Nord. Les réserves de vivres et de charbon
s'amenuisent, malgré l'apport en viande fraîche des animaux
chassés sur la banquise.
En juin, De Long comprend qu'il doit renoncer cette année à
atteindre son but. Impuissant à faire évoluer la situation,
il commence à se laisser gagner par le découragement.
Deuxième hivernage
En septembre 1880, débute le second hivernage. La nuit polaire
s'installe bientôt, suivie des grands froids.
La nouvelle année 1881 est fêtée avec l'espoir qu'elle
apportera la délivrance de la Jeannette et la réalisation
de sa mission. Le 16 mai 1881, la banquise entraîne le navire en
vue d'une terre, la première depuis l'île Herald. C'est l'île
Jeannette, située à 76° 47' de latitude Nord. Le 24
mai, nouvelle terre. Sous le commandement de Melville, une équipe
est envoyée pour reconnaître " au nom du Tout-Puissant
Jéhovah et du gouvernement des Etats-Unis ", l'île Henriette,
située à 77° 8' de latitude Nord.
Ile Henriette (New York Herald 2 mai 1882). |
Ile Jeannette (New York Herald 2 mai 1882). |
De son côté, la banquise poursuit ses mouvements, se fendant
en crevasses ou faisant naître d'immenses blocs. Dans la nuit du
10 au 11 juin 1881, les terribles craquements recommencent. Sous la pression
des glaces, une ancienne crevasse s'ouvre à nouveau, faisant naître
une brèche le long de la coque du navire qui reprend son équilibre.
Les équipements laissés sur la banquise sont rapidement
chargés à bord, dans l'espoir de la création d'un
passage qui pourrait le conduire jusqu'à la mer libre.
Mort de la Jeannette
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Naufrage de la Jeannette
Extrait de la série Tour Du Monde 1884. |
Le 13 juin au petit matin, les forts mouvements de pression reprennent
et des blocs de glace frappent le navire qui gémit et menace d'être
écrasé. Lorsque la coque commence à se remplir d'eau,
De Long donne l'ordre d'évacuer. Vivres, vêtements, couvertures,
livres de bord, tentes, traîneaux, embarcations sont débarquées
sur la banquise.
Quant à la Jeannette, écrasée, elle s'enfonce à
tout jamais sous l'eau.
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