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PLONGEON
FORMIDABLE. TROIS CENTS LIEUES SOUS LES GLACES.
par Charles Rabot |
Mais
de tout les projets, celui qui semble le mieux fait pour
confondre l'imagination est sans doute le projet qui consisterait
à atteindre le Pôle en passant sous la banquise.
On
sait les merveilleux résultats obtenus par nos
ingénieurs qui, les premiers, sont parvenus à
construire des sous-marins réellement maniables
et utiles. Aussi le premier projet d'attaque du Pôle
au moyen de ces engins est-il dû à un officier
de la marine française. Il y a deux ans, un jeune
enseigne de vaisseau, M. de Monthille, présentait
à la Société de Géographie
de Paris un plan de reconnaissance de la banquise en sous-marin.
Les
ingénieurs de la marine déclaraient la
tentative possible avec les moyens d'action dont on
disposait alors; toutefois, par un souci exagéré
de sa responsabilité, la Société
de Géographie refusa d'entendre l'audacieux marin.
A Vienne, on s'est montré moins réservé,
et en présence d'un archiduc? le Dr H. Anschütz-Kaempfe
y a développé un projet de navigation
,sous-marine au Pole.
Ce qui, dans ce projet, semble encore le plus curieux,
c'est qu'on n'a pas à compter avec certains obstacles
auxquels il serait naturel de s'attendre. D'abord, nulle
nécessité de plonger à de grandes
profondeurs: les plus grosses glaces au nord de l'Europe
n'ont pas un tirant d'eau dépassant 20 à
30 mètres.
En
Second lieu, les banquises en été sont
morcelées par des canaux et des étangs.
Dans sa fameuse marche vers le Pôle à plus
de cent lieues de la mer, Nansen a rencontré
des troupes de narvals. Ces animaux étaient arrivés
jusque là en suivant ces canaux, puis en passant
par-dessous les champs de glaces qui les séparaient.
Les sous-marins opéreraient dans les mêmes
conditions, naviguant tantôt à la surface
dans les canaux, tantôt immergés. La marche
du navire serait assurée par deux moteurs, l'un
au pétrole pour la marche à la surface,
l'autre actionné par une batterie d'accumulateurs
pour les plongées. Et dans ce singulier bâtiment,
l'équipage pourrait demeurer sous l'eau pendant
quinze heures, sans crainte d'étouffer, grâce
à d'ingénieux appareils absorbant l'acide
carbonique. Ainsi se trouveraient réalisées
les conceptions fantastiques des romanciers qui, il
y a quelques années, semblaient de purs rêves
d'imaginatif.
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