Nous avons alors pu comprendre une tranche de vie de ces attachants mergules nains qui nichent dans des falaises et volent loin en mer, au milieu des glaces dérivantes, pour nourrir leurs progénitures. Tandis que Ann, d'Alaska, Maguy, d'Irlande et David, bien français, étudiaient le comportement des oiseaux sur la colonie de Kap Hoegh, nous avons mené Vagabond à travers le pack, inhabituellement dense cette année, pour permettre à Heli la finlandaise et à Josef le polonais de plonger bathysonde et filet à plancton dans l'eau de mer à intervalles réguliers. Sans cesser les comptages d'oiseaux. Grands moments de glaces, de brumes, de progressions ou de dérives sur ce tapis roulant bien blanc, pimenté du spectacle d'une ourse avec deux oursons dévorant un phoque. 500 milles nautiques parcourus, 25 échantillons de plancton, 36 profils bathymétriques, mission accomplie.

Le second programme de l'été nous a mené plus au Nord, dans le parc national. L'équipe française de géologues fût tout d'abord cueillie par une queue de cyclone. Les 45 noeuds de vent contraignant Vagabond à lutter hardiment ont eu le mérite de balayer les glaces dérivantes pour les 3 semaines de l'expédition géologique. Quel contraste avec les précédentes semaines ! Entre les fjords du Roi Oscar et de l'Empereur Franz Joseph, d'où part un dédale d'autres fjords magnifiques, nous avons vagabondé sous un soleil permanent au gré de l'oeil des géologues, apte à reconnaître le précambrien du jurassique et surtout du crétacé dans les plissements spectaculaires de ces roches aux couleurs rougeoyantes. En 17 escales finement choisies et de longues heures de marche, les cales de Vagabond se sont progressivement emplies de 150 kg d'échantillons de roches prélevées, orientées et répertoriées avant d'être expédiées puis étudiées en France. Outre la géologie, il y eut les boeufs musqués, les aurores boréales actives pendant les heures de nouvelles nuits, puis une rencontre captivante avec un binôme de la patrouille Sirius, ces militaires danois qui parcourent tout le nord du Groenland en hiver et en traîneaux à chiens, qui nous rappela au projet qui nous attend au Spitsberg.

Vagabond retrouvera la mer dans quelques semaines, ce sera la fin d'un hivernage passionnant.

Après 4 mois de solitude, sans voir le soleil mais envoûtés par les aurores boréales et les clairs de lune, France et moi avons vu les premières motoneiges arriver, et de nouvelles manips scientifiques commencer, pour compléter les mesures effectuées par nous mêmes depuis octobre. Ainsi dès la fin de la nuit polaire, mi février, nous avons accueilli successivement 6 équipes, pour des périodes d'une semaine en moyenne. Nous avons également eu la visite de ma famille, d'amis, de skieurs, de traîneaux à chiens, de cameramen, d'une artiste, d'un journaliste... et de beaucoup d'ours ! Dernièrement, l'un d'eux a détruit complètement une tente de stockage de matériel, revenant plusieurs fois pour finir son oeuvre ! L'intense activité scientifique a diminué début mai, le soleil ne se couche plus, et nous attendons la débâcle, probablement mi-juin. Vagabond devrait ainsi retrouver sa liberté après avoir été prisonnier de la banquise pendant 8 mois... Les scientifiques et l'Institut Polaire Français (IPEV) sont satisfaits de la logistique apportée par Vagabond, nous sommes sollicités pour renouveler l'expérience dès l'hiver prochain ! En attendant, la collaboration avec l'IPEV continue pendant l'été, et nous naviguerons au nord-est du Groenland avec des ornithologues, puis avec des géologues.

L'hivernage en chiffres : 200 bougies, 7 litres de pétrole lampant, environ 2000 litres de gasoil pour chauffage et générateur, 50 kg de biscuits, 75 kg de farine, 15 litres d'huile, 20 kg de lait en poudre, 26 kg de céréales, 20 kg de chocolat, 700 soupes, 250 kg de croquettes (pour nos 2 chiens groenlandais !), 188 relevés hydrographiques (CTD), 55 ours blancs rencontrés ; écart thermique maxi entre intérieur et extérieur : 60°C ; température la plus basse : -40°C ; vent le plus fort : 60 nœuds ; pression atmosphérique mini/maxi : 961/1039 mb ; épaisseur actuelle de la banquise autour de Vagabond : 1m90...

Le journal de bord et l'album photos de l'hivernage continuent d'être mis à jour, vous saurez tout sur la débâcle, n'hésitez pas à réagir par SMS !

Vous pourrez trouver un premier reportage de 13 minutes sur notre hivernage, dans le magazine DVD Voiles et Voiliers No12, en kiosque avec la revue à partir du 18 juin (numéro de juillet).

Nous remercions chaleureusement nos partenaires, ainsi que tous ceux qui ont contribué pour que cette aventure se déroule dans de si bonnes conditions.

A bientôt !
Eric Brossier

Site d'hivernage

Weather has been calm for the last 3 days, sea is freezing slowly and fast ice is forming around Vagabond. We hope it will become soon thick enough to resist to the next gales, allowing us to go to shore more easily. Dogs are looking forward to get more space than on the deck! The weather station is set up and will record every 3 hours wind speed and direction, air pressure, humidity and temperature, until ice breaking up (June? July?). A picture of Vagabond's wintering location is online.
Eric

Photos du précédent voyage du Vagabond >>>

Puget-sur-Argens, le 24 mai 2004,

Bonjour,

Après une période d'un mois consacrée à la préparation de Vagabond au chantier L'Otarie (Arzal, Morbihan), nous vous proposons à nouveau quelques projections et conférences : Puget-sur-Argens, Brest, La Rochelle, Saint-Quay-Portrieux, Findhorn (Ecosse), Milan, La Baule, Douarnenez, La Plagne... tous les détails sur le site internet (cliquez ici) !

Le 22 juillet 2004, Vagabond prendra le départ de Douarnenez pour une nouvelle expédition. Cap sur le Spitzberg (Svalbard) pour une étude de la banquise : à l'occasion d'un long hivernage, le voilier sera prisonnier des glaces dans une région inhabitée (Storfjorden), et quelques scientifiques seront régulièrement accueillis à bord pour assurer les observations prévues.

A suivre...

Eric Brossier repart vers l'Arctique avec pour objectif d'hiverner, sur son voilier polaire, afin de proposer une structure d'accueil dans un site privilégié, déterminé par les besoins des observations scientifiques (probablement Agardhbukta).

En cas de compatibilité avec les observations, et en accord avec les autorités locales, il est envisagé d'accueillir épisodiquement des photographes, caméramans, ornithologues, passionnés d'aurores boréales ou d'ours polaires.

Dates : octobre 2004 à mai ou juin 2005 (en fonction du dégel).
Arrivée prévue à Longyearbyen fin août 2004. Navigation possible en septembre 2004, avant de rejoindre le lieu d'hivernage, ainsi que durant l'été 2005, après l'hivernage.