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COUPURE DE PRESSE La conquête du Pôle Nord 1909 POEME HUMORISTIQUE
Ce poème de Claudin paraît dans la rubrique " La semaine fantaisiste " du Petit Journal du 19 septembre 1909 (n° 983). -.-.-.-.-.-.-.-Au Pôle Nord Vous avez lu cette nouvelle Dont se trouble mainte cervelle Et dont chacun s'occupe fort : Certain docteur que Cook on nomme A, le premier de tous les hommes, Posé le pied au pôle Nord. C'est, dit-on, chose glorieuse, Phénoménale, merveilleuse, Et c'est le comble du progrès . Je veux le croire sur parole Et sans aller moi-même au pôle Afin de voir si c'est bien vrai. Donc, rengainons toute dispute, Ne doutons pas une minute Et répétons avec l'écho : Ayant franchi la terre et l'onde, Cook, debout au sommet du monde, A poussé son Cook oriko. Il a, dans un lieu tout de glace, Fixé une petite place Et s'est écrié : c'est ici ! Mais nul n'était là pour l'entendre Sinon des phoques aux yeux tendres Et des ours aux membres transis. Puis, reprenant vers les frontières De terres plus hospitalières, Vers des pays moins engourdis, Sa marche toujours vagabonde, Il est revenu en ce monde Ainsi qu'il en était parti. Mais le docteur Cook eut à peine Le temps de souffler, ô déveine, Que courut tout à coup un bruit : Au pôle Nord, lieu chimérique, Un autre malin d'Amérique A posé le pied comme lui. Aussitôt ces mêmes louanges Qu'à Cook on donnait sans mélange, On les déverse sur Peary Qui sut de même, l'habile homme, Planter son drapeau là-bas, comme Il en avait fait le pari. Après cette double victoire, Le plus étonnant de l'histoire C'est que demain, touchant accord, Ils seront bien une centaine A prouver de façon certaine Qu'ils sont allés au pôle Nord. Mais ces actions sans pareilles, Dont on nous corne les oreilles, Cette conquête étrange, à quoi Nous serviront-elles ? Mystère ! Personne n'en sait rien sur terre, Pas plus Cook ou Peary que moi. Aux Américains peu importe ! Ce sont des gens d'étrange sorte Pour qui battre un record, fut-il En vérité le plus baroque Comme de surprendre les phoques, Est un triomphe bien viril. D'ailleurs ils sont aussi pratiques, Et si, dans ces pays arctiques, Ils ont vu leur drapeau flotter, Soyez sûrs que, malins et sages, Ils sauront en tirer l'usage Le plus propre à les contenter. Ils aiment les boissons glacées. Ils feront donc la traversée Et, dédaignant le froid mortel, Au pôle, terre américaine, Construiront, la saison prochaine, Une fabrique de cocktails.
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