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COUPURE DE PRESSE


VOYAGE AU PÔLE NORD EN BALLON
Source : L'Illustration - N° 2488 - 1er novembre 1890

  Résumé  

Deux jeunes français, M. Besançon et M. Hermite préparent leur expédition, qui, au printemps 1892 devra leur permettre, à bord du ballon Sivel, de décoller du Spitzberg pour atteindre l'Amérique du Nord ou l'Asie septentrionale, en passant par le pôle Nord. Cette expédition, réalisée pour leur propre compte, et minutieusement préparée, devrait permettre de cartographier la région du pôle nord.

  Texte intégrale  

Existe-t-il au pôle nord de l'eau, des terres ou des glaces ?

La solution de ce problème qui, à diverses reprises, a déjà coûté la vie à tant d'explorateurs, est sur le point d'être tentée de nouveau, par deux jeunes Français, membres de l'Ecole supérieure de navigation aérienne, MM. Besançon, aéronaute, et Gustave Hermite, astronome, neveu de M. Charles Hermite de l'Institut.
Ces deux jeunes gens, dont l'aîné n'a pas trente ans, reprennent pour leur compte, et en se plaçant à un point de vue exclusivement expérimental, une théorie déjà ancienne. Avant eux Silbermann, préparateur de chimie à la Sorbonne, en 1870, et Sivel en 1874, avaient publié des études concluant à la possibilité de la traversée du pôle Nord en ballon. Par un hasard assez fréquent dans l'histoire des découvertes, MM. Hermite et Besançon avaient conçu leur projet sans connaissance des travaux préalables de leurs devanciers.

Ce n'est que dans ces derniers temps qu'ils leur furent signalés, et qu'ils purent y puiser d'utiles documents. Aussi, en reconnaissance de cette aide inattendue et pour rendre hommage à la mémoire de l'illustre martyr de la science aéronautique, les voyageurs ont-ils donné le nom de Sivel à l'aérostat dont ils poursuivent la construction, et grâce auquel ils espèrent rapporter une collection complète de photographies topographiques permettant de dresser une carte de ces régions inconnues.

Le Sivel

Le Sivel sera gonflé au gaz hydrogène pur, cubera 15,000 mètres, avec un diamètre de 30 mètres, et sera susceptible d'enlever 16,500 kilogrammes, la force ascensionnelle étant de un kilogramme 100 grammes par mètre cube. L'enveloppe sera composée de deux épaisseurs de soie de Chine de première qualité, enduites d'un nouveau vernis spécial absolument imperméable qui augmentera encore la résistance de l'enveloppe, susceptible de supporter, avant rupture, une pression de 2,400 kilos par mètre carré.
Le ballon sera formé de 48 côtes ou fuseaux, son volume sera de 14.960 m. c. 661 et sa surface de 2,933 m. carrés 568.

Sa forme sera absolument sphérique.
Le Sivel possède un ballonnet intérieur particulier, ou poche à air de 3,000 mètres cubes, destiné à le tenir toujours parfaitement gonflé et sous pression, remédiant ainsi, en bonne partie, aux graves inconvénients des changements possibles d'altitude provoqués par les variations hygrométriques et thermométriques qui sont les causes principales de l'instabilité des ballons. Le ballonnet intérieur est muni lui-même de deux soupapes de sûreté automatiques ; il sera en communication avec un ventilateur de grand débit actionné par un moteur électrique. Le ventilateur ne fonctionnera que d'après les indications d'un manomètre extérieur.
Si donc le gaz se dilate, on vide la poche intérieure ; s'il se condense, on la remplit et le Sivel reste toujours gonflé.

On remarquera que le ballonnet intérieur représente le cinquième du volume du grand ballon ; cette proportion qui peut paraître considérable n'est que juste si l'on réfléchit qu'un aérostat s'élevant à 830 mètres environ perd en gaz par suite de la dépression atmosphérique le dixième de son volume. D'autre part, la différence de température, qui est toujours plus considérable à l'intérieur de l'aérostat que celle de l'air ambiant, fait qu'un écart de 28 degrés centigrades seulement est suffisant pour faire perdre, par suite de la dilatation de la masse gazeuse, également le dixième du volume du ballon.
Ces deux effets combinés, dépression atmosphérique et variation de température, donnent bien le vide d'un cinquième prévu par le ballonnet intérieur.

Le Sivel emmènera 4 ballonnets pilotes de 50 mètres cube destinés à être lâchés au-dessus du pôle pour l'étude des courants aériens, et 16 ballons de petite taille qui serviront à ravitailler de gaz l'aérostat principal. Attachés à la périphérie du filet, ils seront, au fur et à mesure des besoins, manœuvrés par un treuil, et dirigés sous la soupape de sûreté du grand ballon où le transvasement s'opèrera. Après quoi les voyageurs se débarrasseront de l'enveloppe du ballon vide, ce qui diminuera d'autant leur poids mort. La soupape de sûreté elle-même ne s'ouvrira que sous une pression de 10 millimètres d'eau.

Pour que le Sivel ne s'élève pas trop et conserve une distance à peu près fixe du sol, permettant la régularité des observations photographiques, MM. Hermite et Besançon attacheront à leur nacelle un guide Rope d'un poids très considérable qui, suivant les circonstances, traînera sur les glaces, ou sera remplacé par un autre guide Rope flottant sur les flots, l'un et l'autre devant retenir l'aérostat, en cas de dilatation excessive du gaz, comme une ancre mobile. Ces guides, en filin d'acier, doivent jouer un grand rôle dans le succès de l'entreprise.
Notre première gravure représente le Sivel, avec sa ceinture de ballons de ravitaillement et son guide Rope trainant sur les glaces, tel qu'il sera au début de la traversée.

La nacelle, en osier et rotins avec ossature en acier assurant sa rigidité absolue, sera close et pontée, imperméable, et ses parois intérieures seront capitonnées afin de maintenir dans la chambre des aéronautes une température convenable. A cet effet, ils possèderont un calorifère particulier, à pétrole, dont l'emploi sera sans danger.
Afin de parer à toute éventualité, la nacelle sera insubmersible et munie de patins permettant un facile déplacement sur les glaces. Elle a 3 m. 40 de large sur 5 m. 10 de long. Elle contiendra, outre les deux explorateurs et trois aides, huit chiens, un traîneau, un petit canot insubmersible, des vivres pour un mois et une certaine quantité d'eau, qui servira au besoin de lest, et qu'on empêchera de geler par des moyens chimiques.
Voici d'ailleurs la répartition des poids à emporter calculés sur la force ascensionnelle prévue de 16,500 kilogs.

Cinq hommes et leurs bagages 530
Vivres : 80 jours (hommes et chiens) 2.500
Chiens 350
Armes et outils 250
Instruments d'observation 350
Ballon et ballonnets 2.750
Filet 500
Soupapes et cercles 550
Nacelle arrimée, canot, traineau, treuils, moteurs, etc 2.500
Engins d'arrêt 550
Guides-rope équilibro-directeurs 1.300
Lest (en partie alcool et eau) 4.306
Total égal
(les valeurs sont exprimées en Kilog.)
16.456

 

Au-dessus de la nacelle fermée un pont auquel on accèdera par une échelle de cordes permettra la libre circulation extérieure.
Notre gravure n° 2 donne l'aspect de cette dunette et de la curieuse machination de cordages par laquelle elle est reliée d'une part au ballon et de l'autre à la nacelle. Notre troisième planche est une vue en coupe de la nacelle elle-même avec ses passagers et son attirail.

Le départ prévu pour le printemps 1892

Les explorateurs partiront d'un port de France escortés de deux navires à vapeur dont le nolis constitue la principale dépense. Ce nombre de deux navires leur est, paraît-il, nécessaire en raison du matériel encombrant que nécessiteront le gonflement sur place et la production de l'hydrogène pur qu'ils veulent obtenir par les procédés militaires employés à Chalais-Meudon, malgré le coût onéreux qui s'élève de 95 centimes à 1 fr. 20 par mètre cube.

Le départ aura lieu dans les derniers jours du mois de mai pour arriver au Spitzberg vers le mois de juillet. Là, selon le temps, les aéronautes partiront immédiatement ou attendront des vents favorables, c'est-à-dire des vents du sud. Ils pensent pouvoir tenir l'air au minimum de huit à dix jours et ne supposent pas que leur traversée puisse exiger plus de quatre jours.
Leurs relèvements faits, ils aborderont soit dans l'Amérique du Nord, soit dans l'Asie septentrionale, et, au besoin, prolongeront leur voyage si l'atterrissement ne leur paraît pas favorable.
La carte que nous joignons à nos gravures donne le tracé de l'itinéraire probable de l'aérostat.
La durée totale de l'expédition, y compris le rapatriement, est évaluée à six mois.

Le devis des frais monte à 560,000 francs dont 60,000 pour la construction du Sivel, et 500,000 pour moyens de transport, gonflement et achat du matériel scientifique. Ces frais sont couverts par les ressources personnelles de M. Hermite et des subsides offerts aux voyageurs par quelques capitalistes anglais, désireux de voir leur nation participer à l'initiative de l'entreprise.
En raison des soins minutieux qu'exige la construction du ballon à laquelle MM. Hermite et Besançon président aux-mêmes, de l'entraînement progressif qu'ils veulent prendre, et des expériences préalables qu'ils désirent achever sur la durée maxima des voyages sans atterrissement, leur départ sera sans doute reculé jusqu'en mai 1892.
Sans préjuger l'issue de la tentative, on doit reconnaître qu'elle est étudiée avec beaucoup de soin et ne peut, par sa hardiesse, que faire honneur à la nation à laquelle appartiennent les deux audacieux explorateurs.

Guy Tomel.

Voir les coupures de presse
traitant du voyage en ballon d'Andrée:
L'exédition Andrée au pôle Nord
Un ballon au pôle Nord
Voir aussi notre article détaillé :

La tentative de survol en ballon par ANDREE


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