Spitzberg, Visions d'un baladin des glaces

4e de couverture: Né en 1966, Emmanuel Hussenet aborde l'Arctique à 21 ans. De son incursion aux îles Lofoten, en Norvège, il garde les impressions fortes qui orienteront sa vie. Ainsi, pendant dix années, en tant que guide accompagnateur pour l'agence de voyages Grand Nord, il arpente le Groenland, la terre de Baffin, le Canada, l'Alaska et le Spitzberg. Le kayak de mer devient l'instrument privilégié de ses aventures. Au Spitzberg où il a séjourné cinq fois, il a entrepris un périple solitaire de trois mois.

Emmanuel Hussenet a exploré en kayak la totalité de la façade occidentale du Spitzberg, non pour réaliser une première ou un record, mais pour nouer avec chaque lieu une complicité profonde, et s'adonner à une forme romantique de dépassement de soi. Baladin par sa façon libre d'observer et de relater, il a réussi le mariage entre l'engagement physique, la recherche esthétique et la réflexion.
Voici l'épopée du soleil de minuit. L'auteur navigue parmi les glaces. Il rencontre les morses, les phoques, suit les oiseaux et le renard, accède à des côtes oubliées et redoute chaque jour l'inéluctable face-à-face avec le seigneur des lieux : l'ours blanc. Sans négliger la description géographique du Spitzberg, cet ouvrage est une confession prenante, servie par des photographies dont la beauté, page après page, dévoile la magie de l'Arctique et donne la mesure de sa puissance.

Extrait : " Je ne crois pas avoir choisi l'Arctique avec l'intention de me mettre à l'épreuve ou de mieux me connaître. Ce que je savais de moi me suffisait. Je n'ai vu dans l'austérité des lieux et la rigueur du climat que contraintes ; supporter des contraintes est affaire de résignation et de patience. La résignation et la patience sont vraisemblablement de grandes qualités, mais je ne pense pas qu'elles aient été celles que je cherchais à cultiver. Je souhaitais me dépasser, peut-être, mais ai-je seulement aspiré à cultiver quelque chose ?

Enfant, je rêvais d'équateur, de fleuves puissants et de forêts vierges. Je n'avais aucune prédisposition pour aller vers le froid, au contraire. En quête d'exotisme, de diversité et de luxuriance, je réalisais mon premier voyage au-delà du cercle polaire en marge de mes objectifs. L'Arctique m'a saisi. C'est lui qui m'a convaincu. Bien sûr, j'ai dû faire le deuil de l'abondance, des bruits sauvages, des arbres géants et des poissons d'or, pour apprendre à aimer le dépouillement. Mais mon regard, là-haut, portait plus loin que jamais. Et je compris que par-delà les pays de soleil que j'entrevoyais dans mes rêves, c'était la lumière que je convoitais. "

Maelström, Seul aux confins du Spitzberg

Emmanuel Hussenet est parti trois mois pour tenter d'atteindre le point culminant, en latitude, du continent européen où, stimulé par son exaltante liberté, il réfléchit à sa vie.

Extrait : " La lumière a changé. Moins vive mais plus constante, affranchie des montagnes qui auparavant lui dressaient un mur, la lumière de fin d'été enveloppe les côtes d'une froideur mesurée ; les roches restent ternes sans être sombres, la mer dégagée sans jamais se départir de son gris métallisé. Face à ces côtes monotones les icebergs sont devenus rares, mais les plaques de banquise s'agglutinent encore au fond des baies en troupeaux passifs et muets. Parfois, un pétrel attardé frôle la surface de la mer, silencieux. Un phoque annelé, de temps à autre, montre sa jolie tête et ses grands yeux d'enfant naïf, puis disparaît dans un bref clapotement. "